La rentrée scolaire 2025-2026 a été ternie par une pénurie de manuels scolaires. Si le ministère de l’Éducation nationale, du Préscolaire et des Sports a mis en avant l’ouverture de 169 nouveaux établissements, la création de plus de 2500 classes préscolaires et l’extension du programme des Écoles et collèges pionniers, la réalité du terrain est marquée par des classes sans livres et des retards d’impression inquiétants.
Le lundi 8 septembre, près de 8,27 millions d’élèves ont repris le chemin des cours, dont 7,4 millions inscrits dans le public, encadrés par environ 299 000 enseignants répartis dans plus de 12 000 établissements. Mais derrière ces chiffres encourageants, de nombreux enseignants et élèves attendent toujours leurs manuels, en particulier ceux de français pour la 4e et la 5e année, ainsi que ceux du programme TARL (« Teaching at the right level »), pourtant doté d’un budget de 100 millions de dirhams.
Les retards trouvent leur origine dans des appels d’offres mal ficelés et des délais de production intenables. Les fichiers d’impression n’ont été transmis que récemment aux imprimeurs, alors que la fabrication et la livraison exigent plus de 100 jours. Pire, les prix figés par la procédure d’enchères inversées obligent les imprimeurs à produire à perte, compromettant la viabilité économique du processus. L’association des éditeurs a d’ailleurs saisi le Conseil de la concurrence à ce sujet.
Dans plusieurs académies, des enseignants se voient contraints de distribuer des polycopiés, y compris dans des établissements pilotes censés incarner l’excellence de la réforme. Paradoxalement, des stocks de manuels non distribués de l’an dernier dorment encore dans certaines écoles fermées.
Cette désorganisation vient assombrir une rentrée pourtant placée sous le signe de l’ambition, avec la généralisation progressive de l’anglais, la montée en puissance de l’amazigh dans le primaire, et le déploiement du projet d’établissement intégré (PEI). Le ministre Mohamed Saad Berrada avait lancé officiellement l’année scolaire à Médiouna sous le thème « Pour une école de qualité ».
Mais pour de nombreux enseignants et familles, l’absence de manuels risque de compromettre la confiance dans la réforme et de fragiliser les apprentissages. À l’heure où la feuille de route 2022-2026 vise une amélioration rapide de la qualité de l’enseignement, cette pénurie met en lumière un talon d’Achille : l’impréparation logistique et financière autour d’un outil pédagogique de base.