Autonomie fiscale et développement territorial, Le point de vue de Bensouda

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Le Trésorier Général du Royaume, Noureddine Bensouda, a relevé, samedi à Rabat, que la question de l’autonomie fiscale se pose avec acuité, dans la mesure où elle permet aux élus locaux de disposer d’un pouvoir de décision.

Ce pouvoir de décision oblige ces élus à assumer leurs choix devant les citoyens, a-t-il indiqué lors d’un colloque scientifique hybride initié par le ministère de l’Economie et des finances (Trésorerie Générale du Royaume – TGR), sous le thème « Autonomie fiscale locale et développement territorial: diagnostic et état des lieux ».

A cette occasion, Bensouda a avancé des données chiffrées des finances locales pour mesurer la réalité de l’autonomie fiscale des collectivités territoriales et montrer que l’Etat central demeure également le principal acteur du développement territorial.

Selon lui, l’analyse des ressources globales des collectivités territoriales hors recettes d’emprunt, durant la période 2002-2021, laisse apparaître trois principales tendances à savoir, une prédominance des ressources transférées par l’Etat, y compris les subventions, qui représentent en moyenne 61,6%, avec un pic de 66,5% en 2019 et un minimum de 55,9% en 2006.

Il s’agit aussi d’une tendance haussière des ressources des collectivités territoriales entre 2002 et 2021, sauf en ce qui concerne les années 2012 et 2020 qui ont enregistré un recul des recettes.

Concernant le troisième constat, il porte sur le fait que les ressources encaissées durant chaque année ont généralement permis de couvrir les dépenses globales de la même année, sans recours aux excédents des années antérieures.

Ainsi, les collectivités territoriales continuent de dépendre de l’Etat dans leur financement, même après plusieurs réformes de la fiscalité locale depuis 1976, a fait remarquer M. Bensouda. En effet, les recettes provenant de la fiscalité gérée directement par les collectivités territoriales durant la période 2002-2021, n’ont constitué que 9% en moyenne, avec un pic de 12% en 2013 et un minimum de 4% en 2003, a-t-il précisé.

Par contre, les transferts de l’Etat, composés des parts des collectivités territoriales dans le produit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), de l’Impôt sur les sociétés et de l’Impôt sur le revenu ainsi que du produit de la fiscalité locale gérée par l’Etat pour le compte des collectivités territoriales (taxe d’habitation, taxe de services communaux et taxe professionnelle) assurent respectivement, 53,3% et 16,9% de leurs ressources globales.

En ce qui concerne plus particulièrement les régions et les préfectures et provinces, les recettes transférées représentent plus de 90%3 de leurs ressources globales, alors que les redevances et autres produits domaniaux contribuent en moyenne à hauteur de 10%, a indiqué le Trésorier Général du Royaume, ajoutant que le reliquat, soit 7% des recettes, provient des subventions et dotations budgétaires de l’Etat.

Il apparaît donc que les recettes fiscales propres demeurent encore limitées pour permettre aux collectivités territoriales de participer pleinement au développement des territoires, comparativement à l’ambition consacrée par la Constitution de 2011, qui dispose dans son article 137 que « Les régions et autres collectivités territoriales participent à la mise en œuvre de la politique générale de l’Etat et à l’élaboration des politiques territoriales à travers leurs représentants à la Chambre des Conseillers », a-t-il estimé.

Et de soutenir: « Ainsi, l’autonomie locale est actée par la Constitution. D’ailleurs, l’article 141 précise que ‘Les régions et les autres collectivités territoriales disposent de ressources financières propres et de ressources financières affectées par l’Etat. Tout transfert de compétences de l’Etat vers les collectivités territoriales doit s’accompagner d’un transfert des ressources correspondantes ». Cependant, nous constatons que les finances locales demeurent largement tributaires des transferts de l’Etat, aussi bien celles d’origine fiscale que celles provenant des subventions ».

Parallèlement, Bensouda a constaté que l’Etat demeure, et en dépit des efforts louables consentis par les pouvoirs publics, le principal acteur du développement territorial, puisqu’il est l’investisseur majeur au niveau régional et local. A ce sujet, durant l’année 2019, la part des dépenses locales d’investissement dans les dépenses globales d’investissement de l’Etat et des collectivités territoriales n’a été que de 18,8%.

Cependant, Bensouda a rappelé que les recettes fiscales de l’Etat, connaissent elles-mêmes un ralentissement sous le coup de plusieurs facteurs tant exogènes qu’endogènes tels que la globalisation, le commerce électronique, les crises mondiales, la sécheresse, les pratiques fiscales dommageables….

« Face à cette situation, il s’avère nécessaire de refonder les rapports entre l’Etat et le citoyen, l’Etat et les territoires, une révision complète de notre façon de faire, une recherche permanente de cohérence et une adaptation de nos supports techniques, particulièrement sur le plan fiscal », a-t-il recommandé.

Ce colloque hybride, marqué par la participation des cadres du ministère, de responsables de l’administration territoriale, d’économistes, de fiscalistes et de chercheurs nationaux et internationaux, s’est articulé autour de trois panels portant sur l’autonomie fiscale et le développement territorial, outre la gouvernance et la gestion de la fiscalité locale.

Via ses événements scientifiques, la TGR ambitionne d’incarner la volonté de partage et d’échange qui contribuent à faire mûrir la réflexion et enrichir le débat sur nombre de sujets cruciaux ayant trait aux finances publiques.

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